De la poubelle à la cuisine: Ecochar Guinée
DIALLO Amadou Mouctar
En Guinée les montagnes d’ordures gangrènent l'air ambiant et les arbres disparaissent en charbon de bois constituant une activité de source de revenu jusqu'à ce que Sékou, un jeune entrepreneur décide de fabriquer le charbon vert à partir d'une matière première (déchets) très abondante et ainsi faire d'«une pierre deux coups» à savoir : Sauver les arbres puis débarrasser les ordures et offrir aux populations un meilleur cadre de vie.
80% C’est le pourcentage effroyable de la population qui utilise le bois ou charbon de bois comme source d’énergie en Guinée car peu de gens peuvent se permettre d’acheter du gaz et les zones rurales non pas accès à l'électricité.
Sans charbon de bois, la plupart des fourneaux des guinéens restent froids et ce sont surtout les populations urbaines qui en dépendent. Ainsi à Conakry la capitale tout comme d'ailleurs ses villes environnantes, la plupart des ménages cuisinent encore au charbon des bois et dans un passé récent il était improbable que cela change dans un avenir proche jusqu'à ce qu’un jeune ingénieur de mines à la tête de l’Association des Jeunes pour la Protection de l’Environnement (AJPE) trouve la solution à cette équation. Un « ecochar » pour « lutter contre le réchauffement climatique tout en rendant les villes propres, en protégeant nos forêts et en luttant contre les feux de brousse».
C’est une organisation non gouvernementale située dans la banlieue de Conakry à Matoto, la plus grande commune de la capitale guinéenne et regroupant «plus de quarante (40) membres dont plus de quinze actifs» affirme Sékou, président dudit ONG. Au-delà de la capitale, l’Association des Jeunes pour la Protection de l’Environnement (AJPE) a «deux antennes» à Coyah non loin de Conakry et à Sangarédi dans la zone d'exploitation minière. Pour Sékou et son association, « qui parle d’assainissement doit parler de valorisation des déchets car vouloir faire l’assainissement sans faire une valeur ajoutée des déchets est une peine perdue».
Dans le cadre de la lutte contre le changement climatique, l'AJPE à travers des formations et des sensibilisations, apprend aux populations l'approche qu’elle utilise pour transformer les déchets en charbon vert. D’ailleurs Sékou explique qu’il faut d'abord «faire un tri sélectif à la base c'est-à-dire, séparer les déchets mécaniques des déchets organiques et les plastiques. Bref, les catégoriser. Ensuite on transporte les déchets organiques sur un lieu bien déterminé pour le séchage, après on passe au processus de carbonisation puis le broyage..».
«Actuellement nous produisons 80 kg par jour parce qu’en tant que ' «ONG», notre but n’est pas de commercialiser. L’Idéal c’est d’apprendre aux communautés l’approche pour qu’elles puissent elles-mêmes produire l'éco charbon».
«Mauvais élève»
De 14 millions d'hectares dans les années 1960, le couvert forestier du pays est passé à la fin des années 2010 à moins de 700 000 hectares, ce qui fait de la Guinée «l'un des mauvais élèves» de la conservation des forêts, indique le ministère de l'environnement et du développement durable. «Si nous parlons du réchauffement climatique aujourd'hui c'est parce que c'est l'homme qui détruit la nature à travers ses activités anthropiques» rappelle Sékou avant d’ajouter qu'« il faut trouver des approches pour compenser la nature et/ou atténuer le réchauffement climatique car sinon les futures générations auront du mal à survivre».
En effet, un grand nombre de guinéens arrondissent leurs maigres moyens ou revenus en fabriquant du charbon de bois destiné à la vente. A noter qu'ils se procurent illégalement des bois dont ils ont besoin pour cette activité avec parfois la complicité des autorités locales même si la coupe abusive des bois est interdite. Ainsi les conséquences notoires sont palpables partout, le sol calciné, il ne pleut plus beaucoup. Bref, l’environnement souffre énormément et ces dégâts hypothèquent l’avenir des futures générations.
L’objectif de Sékou est de limiter cette consommation abusive du bois et des charbons de bois par les communautés et avec ce charbon vert, les ménages urbains économisent non seulement de l’argent mais aussi contribuent activement à la conservation de la protection de l’environnement en général et celle de la forêt en particulier.
Aujourd’hui Sékou a réussi et transmet son savoir à d'autres à travers des formations.