"Love is in the Bin" de Banksy

Le 5 octobre 2018, avait eu lieu une vente aux enchères chez Sotheby's à Londres. Alors le marteau
du commissaire-priseur venait tout juste de clôturer la vente d’un célèbre tableau de Banksy intitulé
"Girl With Balloon” au prix de 1 042 000 £, l'œuvre s’est subitement mise à s’autodétruire ! Sous les
regards interloqués du public, la moitié inférieure du tableau a commencé à se déchiqueter, glissant
lentement à travers une broyeuse cachée dans le cadre du tableau.

Banksy est un artiste de rue britannique anonyme, mondialement connu pour ses œuvres de graffiti
mêlant humour noir et satire politique/sociale. Apparu pour la première fois à Bristol dans les années
1990, Banksy utilise des pochoirs pour réaliser ses pièces rapidement, une technique qui est devenue
sa signature.

L'acte de résistance de Banksy par la destruction de son propre travail n'était pas seulement une performance artistique, mais également une critique contre la marchandisation néolibérale excessive de l'art. Le message de ces œuvres étant relégué au second plan, laissant place à la spéculation financière et occultant la forte dimension politique de ses œuvres.

Toutefois, cet acte de "vandalisme artistique" n’a pas forcément eu l’effet escompté que ce soit par le mécanisme de la broyeuse qui s’est interrompu avant d’avoir déchiqueté toute l'œuvre ou l’avenir de
la petite fille au ballon par la suite.

Bien que l'intention initiale était une forme de dénonciation, la déchiqueture de l'œuvre a paradoxalement augmenté sa valeur et son intérêt médiatique. L'œuvre partiellement détruite, désormais surnommée "Love is in the Bin", est devenue une nouvelle icône qui s’est vendue trois ans plus tard pour 18 582 000 £ soit un prix qui s’est largement démultiplié, illustrant ironiquement le phénomène qu'elle cherchait à critiquer.

Ce cas illustre parfaitement la difficulté de résister au système de l'art contemporain, alors que la démarche de Banksy se voulait dénonciatrice, l'artiste a involontairement renforcé la logique du marché qu'il souhaitait critiquer. De quoi questionner la nature paradoxale de l'art contemporain et les stratégies possibles pour maintenir une intégrité artistique face à la marchandisation du monde.

Naël Torondel